Contrefaçon de marque – Mots-clefs – Code source site internet

Paris, 19 avril 2023, RG 21/17661.

Au sujet de l’usage de termes correspondants à des marques dans le code source d’un site internet, en vue d’en améliorer le référencement sur internet, la Cour d’appel de Paris a décidé le 19 avril 2023 :

« Aux termes de l’article L. 713-2 du Code de la propriété intellectuelle, dans sa version applicable au litige, « Est interdit, sauf autorisation du titulaire de la marque, l'usage dans la vie des affaires pour des produits ou des services :

1° D'un signe identique à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée ;

2° D'un signe identique ou similaire à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, s'il existe, dans l'esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d'association du signe avec la marque. »

Ce texte réalise la transposition en droit interne de l'article 5 de la Directive 89/104/CEE du 21 décembre 1988 rapprochant les législations des États membres sur les marques.

Dans un arrêt Google du 23 mars 2010 C-236/08 à C-238/08, la Cour de justice de l'Union européenne, interprétant cette disposition de la Directive, a rappelé (considérant 76) que le titulaire de la marque ne saurait s'opposer à l'usage d'un signe identique à la marque, si cet usage n'est susceptible de porter atteinte à aucune des fonctions de celle-ci.

Par cet arrêt la CJUE a dit pour droit que le titulaire d'une marque est habilité à interdire à un annonceur de faire, à partir d'un mot clé identique à ladite marque que cet annonceur a sans le consentement dudit titulaire sélectionné dans le cadre d'un service de référencement sur internet, de la publicité pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels ladite marque est enregistrée, lorsque ladite publicité ne permet pas ou permet seulement difficilement à l'internaute moyen de savoir si les produits ou les services visés par l'annonce proviennent du titulaire de la marque ou d'une entreprise économiquement liée à celui-ci ou, au contraire, d'un tiers.

Dans son arrêt Interflora rendu le 22 septembre 2011 C-323/09, la CJUE a précisé aux points 44 et 45 qu'il y a atteinte à la fonction d'indication d'origine d'une marque lorsque l'annonce apparaît tout de suite après l'introduction de la marque en tant que mot de recherche et est affichée à un moment où la marque est, dans sa qualité de mot de recherche, également indiquée sur l'écran, et quand l'annonce, tout en ne suggérant pas l'existence d'un lien économique, reste à tel point vague sur l'origine des produits ou des services en cause qu'un internaute normalement informé et raisonnablement attentif n'est pas en mesure de savoir, sur la base du lien promotionnel et du message commercial qui est joint à celui-ci.

En l'espèce il résulte des procès-verbaux de constat d'huissier de justice des 14 et 15 mai 2019 que l'huissier de justice après avoir lancé des recherches à partir des mots clés « R… » aboutissant à divers résultats naturels, a sélectionné le lien du site t…, puis après avoir effectué un clic droit a choisi la rubrique « code source de la page » pour constater qu'au sein de cette rubrique « code source » le terme R… apparaissait 29 fois dans le code source de la page t...fr/tag/, 16 fois dans le code source de la page opt…/, et 35 fois dans le code source de la page optimi…

Toutefois, ainsi que l'a relevé le tribunal cette présence du signe R… au sein du code source est invisible pour le consommateur des produits et services visés qui lorsqu'il consulte un site ne se rend pas sur cette page relative au contenu informatique du code source, sans lien avec les produits et services commercialisés sur ledit site. Aucune contrefaçon de marque n'est dès lors caractérisée de ce fait. »



Alexandre Bories
  • Avocat à la Cour - Docteur en droit
  • Spécialiste en droit de la propriété intellectuelle
  • Spécialiste en droit du numérique et des communications
Avocat Spécialiste
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